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L’alternance se multiplie

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En France, seuls 6,2% des jeunes de 15 à 24 ans sont en alternance. Face à une demande croissante des entreprises, grandes écoles et universités multiplient les formations.

 

L ’apprentissage ? Peut mieux faire ! En dépit d’une légère embellie en 2015 (+2 %) après des années de baisse, le nombre d’apprentis stagne juste au-dessus des 400.000, bien en deçà des objectifs des gouvernements de tous bords qui se succèdent depuis vingt ans.

Du coup, Manuel Valls a sorti l’artillerie lourde cette année (nouvelles aides pour les employeurs, simplification de la réglementation du travail, mobilisation de la fonction publique…). Objectif : 500.000 apprentis en 2017. Un énième plan de relance avec le même objectif que celui fixé pour 2009 par le plan de cohésion sociale de… 2005.

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Mais, au chapitre des bonnes nouvelles, l’alternance se porte à merveille dans l’enseignement supérieur. Aujourd’hui, 10 % des étudiants obtiennent leur diplôme par voie d’apprentissage dans les grandes écoles, soit 24.000 des quelque 140.000 apprentis inscrits dans l’enseignement supérieur.

Tous conquis !

Parfait exemple de cette envolée, l’Essec — pionnière en la matière —a formé plus de 5.000 étudiants par alternance depuis que la business school s’est lancée sur ce créneau en 1993. ESCP Europe s’est, elle aussi, mise au diapason : “L’alternance est une voie d’excellence pour environ 120 étudiants par an qui bénéficient de cours spécifiques et d’un directeur scientifique dédié”, indique Michèle Dain, responsable de l’alternance de l’école parisienne qui entend répondre à “une demande croissante des entreprises”.

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Un à un, les derniers foyers de résistance tombent. Institution vieille de plus de 150 ans, l’Ecole centrale de Lyon a introduit l’alternance en troisième année, il y a deux ans, après avoir ouvert en 2012 une formation d’ingénieur en énergie, 100 % en apprentissage. Quant à l’université, avec ses 30.000 apprentis, elle a pris du retard mais elle joue le jeu de l’alternance, en particulier au niveau master. Surtout les jeunes universités d’Ile-de France.

Championne toutes catégories, l’université de Paris-Est Marne-la-Vallée (UPEMV) compte 2.500 alternants (dont 2.300 apprentis) sur un total de 12.000 étudiants. Vice-président de l’UPEMV, Frédéric Toumazet rappelle que l’alternance est inscrite dans les gènes de la maison : “Dès sa création, l’université s’est fixé une orientation très professionnelle en faisant beaucoup d’efforts sur la formation continue et l’apprentissage.” Résultat : Paris-Est Marne-la-Vallée offre aujourd’hui un éventail d’une centaine de formations en alternance, tous niveaux confondus, du DUT au diplôme d’école d’ingénieur.

Des frais de scolarité couverts par l’entreprise

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Ce n’est pas seulement pour l’amour de l’art que l’enseignement supérieur s’est converti à l’alternance. A Centrale-Supélec, Géraldine Aude croule sous les demandes des entreprises. La responsable de l’alternance reçoit entre 10 et 15 propositions de contrat pour chacun de ses 70 apprentis. “Le contrat de professionnalisation en troisième année est ce qui rencontre le plus de succès auprès des étudiants, explique-t-elle. Nous en avons une vingtaine par an et j’ai déjà une quarantaine de demandes pour l’année prochaine. Beaucoup d’étudiants font une césure entre la 2e et la 3e année. Le contrat pro en dernière année leur permet de continuer à travailler en entreprise et à être rémunérés.” C’est le cas de Laure, étudiante en 3e année à Centrale Lyon en contrat de professionnalisation chez Solvay à la Part-Dieu : “Après une année de césure d’un an chez Procter & Gamble, je me voyais mal revenir à Lyon pour suivre des cours théoriques pendant un an.”

Pour Malika, étudiante à Audencia et apprentie pour deux ans chez Accenture, les motifs sont purement financiers. “C’était indispensable pour moi vu le montant des frais de scolarité — 10.000 euros par an — qui sont pris en charge par l’entreprise”, explique-t-elle. A la Conférence des Grandes Ecoles, Francis Jouanjean insiste sur ce rôle d’ascenseur social : “L’alternance est un excellent moyen d’ouvrir socialement l’enseignement supérieur. Le taux de jeunes issus de milieux modestes y est très supérieur à ceux des programmes classiques.”

Mais c’est avant tout un nouveau mode de sourcing pour les employeurs. Ainsi chez Sopra Steria, l’alternance continue sa montée en puissance. “Il y a trois ou quatre ans, nous avions 150 alternants. En 2015, nous avons recruté 250 jeunes, moitié en apprentissage, moitié en contrat de professionnalisation et nous visons 300 alternants sur 2016. Nous poussons vraiment les entités opérationnelles dans cette voie”, indique Fabrice Losson, directeur relations écoles et marque employeur. Les recruteurs sont quasi unanimes : “Les alternants ont des profils plus matures car ils font deux parcours à la fois”, ajoute-t-il.

Un tremplin pour l’emploi

Une manière pour les jeunes de marquer des points sur le marché de l’emploi… “Cette expérience de terrain fait toute la différence, notamment par rapport aux autres étudiants qui font un stage de quelques mois chaque année et un autre en fin d’études”, remarque Christelle, en deuxième année de master maintenance SQE à Paris XIII et apprentie au sein du département R&D d’EDF.

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Les taux de conversion en CDI sont probants. 90% des alternants de l’ESCP ont une proposition de job, que 80% acceptent. Chez Sopra Steria, 80% des alternants se voient proposer un CDI et 65% d’entre eux (contre 75 à 80% pour les stagiaires) continuent dans le groupe car un certain nombre d’entre eux va “vendre ailleurs la première expérience de deux ou trois ans qu’ils ont sur leur CV”, reconnaît Fabrice Losson.

Accenture recrute, selon les années, entre 50 et 70% de ses alternants, EDF, environ 40%. “La raison d’être de l’alternance réside dans cette logique de pré- embauche, remarque Josette Collombat, responsable du pôle emploi-recrutement-alternance d’EDF. Un contrat de trois ans permet de se créer un solide réseau tant interne qu’externe.” Notamment chez les sous-traitants de l’électricien, friands des alternants bien formés d’EDF. Si BNP Paribas recrute plus de 50% de ses 1.000 alternants du supérieur, “cela ne veut pas dire qu’il y a un refus d’embaucher dans la moitié des cas”, constate Béatrice Perrot.

Stagiaire ou alternant ?

Dans les années à venir, les entreprises auront un arbitrage à faire entre stagiaires et alternants. Certes, avec la prise en charge des frais de scolarité et les salaires, “les alternants coûtent plus cher que les stagiaires, mais il y a une sévère concurrence sur les étudiants en fin d’études”, dit-on chez Sopra Steria. De plus, la loi sur l’encadrement des stages de 2014, appliquée depuis 2015, empêche les entreprises d’employer un stagiaire plus de six mois.

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Finalement, la seule ombre au tableau, c’est la réforme de la taxe d’apprentissage, en application depuis la collecte de 2015, qui a privé les entreprises d’une partie de leurs marges de manœuvre en matière d’affectation de la taxe. “On avait prévenu le ministère dès 2013 des dangers de la réforme. Et on a vu le résultat, avec 30% de baisse de collecte dès la première année d’application”, dénonce Francis Jouanjean, délégué général de la CGE. Y compris chez des très grandes comme l’ESTP. “On a voulu favoriser les diplômes de niveau inférieur, mais il ne faudrait pas que cela se traduise négativement pour l’enseignement supérieur qui tire l’ensemble de la filière.” Et l’apprentissage a vraiment besoin d’une locomotive par les temps qui courent.

Source : http://start.lesechos.fr/continuer-etudes/master-ms-mba/pourquoi-toutes-les-ecoles-se-mettent-a-l-alternance-4624.php